Restauration d’une chapelle par Hervé Cadène
Pour ce mois de décembre 2016, nous partons dans les Pyrénées Orientales pour découvrir le chantier de restauration d’une chapelle, réalisé par l’entreprise Athaner Batiment Restauration. Hervé Cadène, directeur technique maçonnerie de l’entreprise, basée à Argelès sur Mer (66), supervise actuellement 40 personnes pour la partie maçonnerie ; la société recense 85 salariés au total, la majeure partie travaillant dans la section peinture.
« Nous avons obtenu ce chantier de restauration de la chapelle romane Notre-Dame de Tanya à Laroque des Albères (66) suite à un appel d’offre lancé par la commune, pour réaliser des travaux de restauration de l’intérieur et de l’extérieur de la chapelle datant du 14ème siècle.
Une équipe de 4 personnes a réalisé ce chantier en 2 phases de 5 mois chacune, de janvier à mai 2015 pour l’intérieur et de janvier à mai 2016 pour la restauration extérieure.La principale contrainte de ce chantier a été son attrait touristique. C’est un lieu très joli et très visité durant la période estivale et les fêtes de fin d’année ; ce qui nous a contraints à réaliser nos travaux en 2 tranches, hors saison et dans des intervalles courts.
La seconde difficulté rencontrée a été sa situation géographique, à côté d’un cimetière. Les services archéologiques sont intervenus pour faire des fouilles et ont rédigé un rapport que nous avons dû suivre lors des travaux. Un architecte des Bâtiments de France est venu pendant et à la fin des travaux pour vérifier que nous avions bien suivi les consignes.
La première phase de travaux a concerné la restauration de l’intérieur de la chapelle en 2015.
Nous avons commencé par piquer tous les enduits, avons protégé le retable qui est resté en place et avons enlevé tout le mobilier statuaire pour ne pas l’endommager. L’architecte des Bâtiments de France a souhaité appliquer un enduit à la chaux avec une finition au badigeon sur le support en pierre, découvert sous l’enduit. Nous avons donc choisi d’utiliser de la chaux aérienne pour réaliser nos 3 couches d’enduit, la dernière ayant été serrée au couteau, pour appliquer par-dessus un badigeon à la chaux en 2 couches, teinté avec des pigments naturels de couleur ocre. De nombreux échantillons ont été proposés, pour se rapprocher au plus près de la teinte d’origine de la chapelle et rester dans un ton sobre. Tous les murs intérieurs ainsi que la voûte ont été restaurés ainsi, avec i.design CAEB.
Le sol de la chapelle a été conservé tel quel. Après avoir terminé l’intérieur, nous avons attendu une saison pour entamer la 2ème phase en 2016 : la restauration extérieure. Il y avait beaucoup d’humidité dans les murs, c’est pourquoi nous avons procédé à un drainage extérieur avec du gravier et du feutre géotextile pour assainir les murs et les ventiler. Tout ceci a été réalisé sous le contrôle du service archéologique, pour éviter que nous touchions aux sépultures. Nous devions respecter certaines profondeurs pour creuser, en nous référant aux préconisations archéologiques pour ne pas abîmer les dépouilles.
Les murs étaient en pierres à vue, excepté certaines parties recouvertes d’un vieux crépi que nous avons piqué. Nous avons recreusé les joints et remaillé de la maçonnerie de pierres car il en manquait à certains endroits. Nous avons fait des injections de coulis de chaux dans quelques fissures, en utilisant i.flow COULYS, spécialement conçu pour ce genre de problématique. Nous avons rejointoyé toutes les façades de la chapelle en utilisant la chaux hydraulique naturelle blanche NHL 3.5 i.design RENOBLANCHE. Nous l’avons mélangée à 3 sables locaux différents pour obtenir la bonne granulométrie et retrouver la composition des mortiers anciens réalisés à l’époque avec du tout-venant non calibré. Nous avons teinté ce mortier avec des ocres naturelles de Provence, et ainsi laissé les murs extérieurs en pierres apparentes à vue.
Nous avons traité la corniche en pierres en procédant à un gommage puis nous avons appliqué un reminéralisateur pour redurcir les pierres, que nous avons laissées telles quelles.
La porte d’entrée de la chapelle était en bon état ; nous l’avons juste remise en teinte, en appliquant du brou de noix et un patine ancienne fluide pour donner un effet bois patiné. Nous avons également repris 3 ouvertures en pierres de taille grossière, qui avaient subi des dégâts au fil des siècles. Nous avons récupéré des pierres sur site et dans la montagne environnante, qui produit naturellement ces pierres du fait de l’érosion. Nous avons trié et choisi les pierres, puis nous les avons retaillées avant de les reposer. Nous avons rebâti les ouvertures à la chaux en utilisant également i.design RENOBLANCHE, teintée avec des ocres naturelles et mélangée à des sables de plus gros calibre pour obtenir une plus forte granulométrie. Nous avons réalisé une finition brossée des joints des ouvertures.Tout a été fait manuellement, en respectant les techniques de restauration à l’ancienne.
Ce qui est intéressant sur ce genre de projet d’envergure, c’est de pouvoir faire entièrement la restauration du bâtiment et de le voir fini car souvent, par manque de budget des communes quand le chantier est trop conséquent, seule une partie est restaurée. Or pour cette chapelle, nous avons restauré l’intérieur et l’extérieur en 2 phases, en seulement 2 ans et le résultat est vraiment très joli ! »
Chiffres clés
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Durée du chantier : 2 tranches de 5 mois (janvier à mai 2015 et janvier à mai 2016)
- Equipes de 4 personnes
- Produits utilisés : Chaux aérienne, chaux hydraulique naturelle blanche NHL 3.5, Ocres et Pigments naturels
- Façades extérieures : 600 m²
- Murs intérieurs et voûtes : 350 m²